Ce midi est bien différent. L’équipe mange et converse avec entrain.
D’habitude, chaque repas est un temps de grande crispation : Luc, un collègue, a la manie d’arriver au restaurant avec une demi-heure de retard. De fait, cela oblige les autres à l’attendre de pied ferme. Crispés parce qu’à bout d’argument, fatigués d’avoir cent fois consacré du temps à le convaincre d’arriver à l’heure, finalement ils s’agacent les uns les autres. Quant à lui, débonnaire, il réplique invariablement : « oh, désolé, fallait commencer sans moi. »
Hier, Médéric, un collègue nouvellement arrivé, écoute d’une oreille attentive, puis explique que selon l’approche systémique il ne sert à rien de s’acharner à de grandes explications. En effet, il est souvent plus profitable de faire vivre une expérience forte qui amène à changer…
Ce midi, donc, l’équipe a commencé à manger dès que le groupe s’est installé autour de la table. Lorsque Luc arrive, ils sont au dessert.
« Ah !? Vous avez commencé sans moi… » murmure-t-il.
« Oui, nous avons suivi ton conseil… »
Ils terminent par un café et sortent de table alors que Luc commence à peine son canard à l’orange. Depuis, Luc leur en veut un peu, mais de moins en moins. Il arrive au restaurant presque en même temps que les autres et cela leur est suffisant.
Lorsqu’il semble trainer et reprendre ses anciennes habitudes, il y en toujours un pour plaisanter : « Dépêche-toi, mon canard ! »
Il est rarement nécessaire de rentrer dans de grandes explications pour faire changer chez l’autre un comportement qui nous est dérangeant : une expérience qui fait office d’apprentissage est souvent bien plus efficace.